mercredi 6 juillet 2022

[ CHRONIQUE ]


FONTAINES D.C. 
Skinty Fia
CD/VINYLE/K7
[ Partisan Records ]
22.04.22


Formé en 2014 à Dublin, FONTAINES devient FONTAINES D.C. en 2017. Fraichement signé sur le label Partisan, le quintette irlandais propose dès 2018 le marquant 'Too Real'. Après un premier album remarqué et récompensé, 'Dogrel' en 2019, la formation prend de l'ampleur avec l'excellent 'A Hero's Death' en 2020. Suite à une tournée avortée pour cause d'urgence sanitaire, FONTAINES D.C. décide d'utiliser cette période pour enregistrer de nouveaux titres. D'une session de trente-quatre morceaux, il en sera extrait dix pour 'Skinty Fia' qui déboule au printemps et grossi plus encore les rangs d'amateurs du post punk de FONTAINES D.C. 

L'entrée en matière de 'Skinty Fia' résulte d'un juron Gaélique faisant référence à 'La Malédiction Du Cerf'. Titre hypnotique au développement long, sorte de marche funèbre qui prend de l'épaisseur accompagnée du justement nasillard Grian Chatten, 'In Ar Gcroithe Go Deo' est une longue introduction sombre et syncopée. La voix se fait plus douce sur un rythme plus calme pour ce mélancolique 'Big Shot' emprunt de nostalgie, propulsé dans le cieux par une guitare très 60's. De 'Big Shot' se dégage une nostalgie, des couleurs sépia douces et rassurantes. FONTAINES D.C. a la faculté d'être à la fois frontal et mélancolique et c'est la mélancolie qui l'emporte sur ce début de disque avec 'How Cold Love Is' ou la courte expérience de jeunes gens dans le jeu tortueux de l'amour. Scandé  d'un accent irlandais marqué, le cool 'Jackie Down The Line' est l'air de rien un titre qui donne la bougeotte. Parfait pour observer que sur scène le frontman Grian Chatten gagne en assurance vocale et en magnétisme. Sur 'Skinty Fia', le groupe en total cohésion n'est il pas simplement en train de pousser un cri d'amour à ce qu'il sont et d'où ils viennent, ne sont -ils pas simplement en possession d'eux même face à la mondialisation qui n'y pourra rien?. FONAINES D.C. est on ne peux plus honnête et authentique dans ce qu'il offre.  Avec la ballade 'Roman Holiday' c'est la bascule vers un voyage hors du temps, un invitation à tourner le dos à l'illusion et ressentir à nouveau. Fragile et vaporeuse, c'est une promenade de toute beauté. Pour ce troisième disque le groupe a su s'approprier les machines dans le processus de création en les incluant naturellement à certains éléments comme dans sur le titre 'Skinty Fia' qui brouille les pistes et donne à l'ensemble une froideur glaçante et robotique. Unanime sur 'I Love You', avec ses arpèges fragiles tout en suspension, on est dans la chanson d'amour pures et parfaites parfois proche dans certaines sonorités d'un Cure rafraichi. Solennel et ténébreux, 'Nabokov' en final incandescent toutes guitares dehors enflamme et bouleverse par sa puissance et par la douleur qu'il dégage. Une histoire de trahison, de soumission et de déchirement. 

FONTAINES D.C. avec 'Skinty Fia' noirci le ton et offre un disque plus profond, sans doute personnel d'une adaptation à la vie dans un monde réfractaire. c'est beau et noble, authentique et fort. Un disque riche de son et de propos qui monte encore d'un cran le niveau d'un groupe qui évolue vite sur la corde raide. Finalement,  FONTAINES D.C. trace une route qui lui est propre et suivre cette trace est décidément passionnant !
 
 

lundi 4 juillet 2022

[ CHRONIQUE ]


 
50 FOOT WAVE
Black Pearl
CD/VINYLE
[Fire Records]
15.04.22
 

 
50 FOOT WAVE est une des incarnations de l'américaine Kristin Hersh plus connu pour être la tête pensante et principale créatrice au sein des légendaires Throwing Muses. Alors que son groupe existe depuis une dizaine d'année, Kristin Hersh propose dès 1993 son premier album solo. Huit autres sont parus depuis. Au début des années 2000, accompagnée du bassiste de Throwing Muses, Bernard George et du batteur Rob Ahlers, Kristin Hersh à besoin de s'exprimer dans une structure instantanée et monte 50 FOOT WAVE comme un projet live de punk rock. Pourtant en 2003 paraît un format court enregistré en studio en prise directe. Depuis le groupe perdure et offre ici et là des enregistrements de rock US claquant de vie.
 
Le dernier en date paru sur le label Fire Records à pour titre 'Black Pearl', un condensé de rock saturé sur une demie heure de temps qui débute avec le lourd et charpenté 'Staring Into The Sun'. Outre la voix singulière de Kristin Hersh, ce titre bénéficie d'une section rythmique basse batterie très appuyée qui donne à l'ensemble un son cossu et impose une mélodie simple et efficace. 'Hog Child', plus décharné est un blues mutant poisseux et mélancolique qui collerait parfaitement à ses endroits reculés des Etats-Unis oubliés du reste du monde. Une composition à la beauté crue qui ne ment pas, au risque de faire peur. 'Black Pearl' est un instrumental atmosphérique, sorte de 'ghost track' qui reste en suspend, une douce hallucination. Kristin Hersh n'a jamais caché son admiration pour Kurt Cobain qu'elle a reprit par le passé. Dans 'Broken Sugar', titre foutraque, on retrouve l'influence de Cobain dans certains choix délibérés. Pour 'Blush', une rock-song âpre bluesy et chaloupée, l'artiste met l'accent sur l'instantané, ligne conductrice du projet. 'Black Pearl' a été d'ailleurs une fois encore enregistré en prise directe. Ca frappe fort et ça sonne de tout côté. Le septième et dernier titre, 'Double Barrel' est de loin le plus mélodique et rappelle fortement la maison mère Throwing Muses. presque pop rock, cette conclusion est une envolée intense au son massif vers une éclaircie bien nécessaire après avoir passé ces zones orageuses. A noter que la très belle pochette du disque paru en vinyle turquoise est une collaboration de Kristin Hersh avec le célèbre photographe rock Steve Gullick, connu pour être l'auteur de clichés représentant entre autre Kurt Cobain ou le regretté Mark Lanegan. Une fois encore 50 FOOT WAVE propose un disque âpre, direct et sans concession comme peut souvent l'être sa créatrice.

dimanche 3 juillet 2022

[ CHRONIQUE ]


 
DANIEL ROSSEN
You Belong There
CD/VINYLE
[Warp Records]
08.04.22
 
 
Le Californien DANIEL ROSSEN, nait au coeur de l'été 82 et il n'a que 18 ans lorsqu'il forme avec Fred Nicolaus Department Of Eagles en 2000. Le duo qui commence à produire de la musique bricolée vogue naturellement au fil des années vers la mélodie ciselée via le jeu de guitare particulier  en arpège de DANIEL ROSSEN. En 2008, l'acoustique 'In Ear Park' sera le chef d'oeuvre mais ce sera aussi le dernier album. DANIEL ROSSEN qui est aussi un membre actif de Grizzly Bear est emporté par l'explosion du groupe après le succès de l'album 'Yellow House' en 2006. En 2012 pourtant, poussé par le label Warp, l'artiste se décide à publier des titres restés sur la touche lors de sessions d'enregistrements pour Grizzly Bear. La magie opère avec le EP 'Silent Hour / Golden Mile'. La tessiture vocale unique de DANIEL ROSSEN mêlée aux  envolées de cordes enthousiasment et l'on se met à en espérer davantage ! Il faudra attendre le printemps 2022 pour que 'You Belong There', le premier album solo de DANIEL ROSSEN devenu papa peu de temps avant sa sortie ne paraisse.
 
Enregistrés sur une période de trois ans entre 2019 et 2021, les dix compositions touchent ici au merveilleux entre volutes vocales irréelles et fragiles arpèges, les mélodie virevoltent en apesanteur et majesté. Les portes ouvertes sur la magie de 'It's a Passage' laissent entrer le soleil tendre d'un matin d'été au travers de 'Shadow In The Frame' qui voyage entre ciel et terre au battement d'aile d'un papillon aux couleurs chatoyantes. L'art de DANIEL ROSSEN est pétri d'authenticité et de poésie et son univers possède les charmes et la beauté d'un monde disparu. Le titre 'Unpeopled Space' se développe sur près de six minutes au travers d'une épique ballade en trois temps, entre urgence et temps morts, les mouvements de cette composition possèdent un charme fou et le lyrisme qui s'en dégage et d'une beauté renversante. DANIEL ROSSEN crée une musique hors du temps, emprunte de romantisme et de tradition folk dans une association unique dont lui seul à le secret. Ces chansons racontes des histoires simples et essentielles et 'I'll Wait For Your Visit' s'échappe de tout schéma connu dans une totale liberté de ton. Il ne sera donné à personne de pouvoir écouter une telle musique ailleurs. L'univers de ROSSEN est unique et sa vérité emporte, charme, bouleverse dans un foisonnement passionné de multiples talents. Il suffit de se laisser bercer par la valse onirique, 'The Last One' en fin d'album pour être convaincu. L'artiste emmène ses mélodies où personne ne les attend et sublime l'épure vers des sommets de beauté. La conclusion 'Repeat The Pattern' accompagne l'auditeur vers l'issue d'un songe les yeux grands ouverts et le laisse là à la frontière du passé et du présent un peu perdu mais nourri de poésie et d'un charme qu'on ne croise pas à chaque coin de rue. DANIEL ROSSEN avec 'You Belong There' un classique instantané, un disque unique et précieux qui n'est pas prêt de nous quitter. Merveilleux !