dimanche 18 février 2024

[ CHRONIQUE ]


AND ALSO THE TREES 
Mother-Of-Pearl Moon
Vinyle / Compact Disc
[ AATT - Cargo ]


AND ALSO THE TREES fort de son vécu à traversé les époques, enrichissant son art au fil des décennies traversées avec panache. La mutation de la formation autour du noyau dur des frères Jones a été bénéfique à l'évolution d'une musique dont les racines restent ancrées dans le post punk et le romantisme. Alors que d'autres terres s'appauvrissent avec le temps, AND ALSO THE TREES étoffe, affine et enrichi des compositions toujours inspirées et inspirantes. Voilà 45 ans que le groupe enchante et transporte de ses créations ciselées et panoramiques et depuis 1984, les disques se succèdent avec son lot de titres lyriques et profonds dans une danse à la fois incandescente, chatoyante et fantomatique. Le line up qui compose aujourd'hui AND ALSO THE TREES est identique à celui du du superbe 'The Bone Carver' paru il y a deux ans. Simon-Huw Jones (voix, textes) et Justin Jones (guitares, compositions) sont entourés des talentueux Paul Hill aux percussions,  Grant Gordon à la basse et Colin Ozanne à la clarinette et aux claviers. 
Sur 'Mother-Of-Pearl Moon', quinzième album du groupe, on retrouve cette atmosphère ' Balkans' essentiellement liée aux guitares ciselées de Justin Jones et à la présence de la clarinette dans plusieurs titres. Les compositions sont feutrées et le disque déploie de somptueuses ballades chantées et parlées de la voix chaude et singulière d'un Simon-Huw Jones déclamant des textes oniriques et intimistes. Les écrits de Simon Jones peuvent aussi être interrogatifs comme dans 'This Path Trough The Meadow'. Quelle est la place de l'Homme dans la nature et son positionnement au sein du monde animal?. Le titre de ce quinzième disque, lui, fait référence aux océans, à l'Extrême-Orient, ses jardins exotiques, ses eaux calmes et sa lune de nacre. Depuis toujours AND ALSO THE TREES est l'exemple même de la liberté, se préservant de toute main mise sur sa création et sur ces décisions, par une indépendance de toujours et sans faille.  Ce nouvel album est aussi sans doute le plus cinématographique de la carrière du groupe, faisant référence aux années 50 et 70 d'un certain cinéma. C'est un disque plus intimiste et expérimental, celui d'un groupe qui chemine tout en finesse aux travers de divers climax avec le talent qu'on lui connait.  Musicalement, cette nouvelle collection qui se décline en onze plages, reste dans la lignée de 'The Bone Carver' en poussant encore le travail dans le détail. L'introduction lente et mystérieuse, est un instrumental plutôt expérimental, auquel succède le superbe 'The Whaler', titre calme tout en suspension qui met en valeur la voix chaude et profonde de Simon-Huw Jones. La ballade envoûtante et crépusculaire prend aux tripes. 
Plus tendu, 'Town Square' est un titre plus traditionnel pour AND ALSO THE TREES qui tisse ici via la guitare délicate de Justin Jones un titre chaloupé soutenu du jeux de batterie de Paul Hill, ravivé par la clarinette de Colin Ozanne. Dans le morceau 'Mother-Of-Pearl Moon' on pourrait presque apercevoir le fantôme de Morisson dans un titres nébuleux et mystérieux, proche de certaines bandes originales de films noirs des années 50. 'This Path Trough The Meadow' est une merveille, un rêve les yeux grands ouverts. La mélodie de dentelle accompagne l'histoire contée par cette voix centrale, rassurante, chaleureuse. Tout n'est que douceur, finesse et beauté alors qu'une douce lumière baigne la scène. Absolu et soyeux. En milieu d'album, 'Valdrada', ballade mélancolique emplie l'espace de sa mélodie sinueuse et emporte l'auditeur dans un ailleurs fait de vent et d'espace, de liberté et de couleurs. Après le clair, c'est l'obscur qui emboîte le pas et comme son titre le laisse entendre, 'No Mountains, No Horizon' est un titre sombre, un passage en souffrance, plaintif et fantomatique. La froideur que dégage cette composition, instrumentale dénote avec le reste du disque. Désincarné et triste, cette tirade impressionne lorsqu'enfin à presque trois minutes, s'engage une rythmique aux allures d'urgence. Plus à vif, l'ensemble fédère et touche au plus profond. Déstabilisant et magnifique ! A le tempête succède l'épure 'Visions Of A Stray' qui se déploie en deux actes. Le chant majoritaire s'estompe au profit d'un final incandescent mené par la guitare, un piano en roue libre et une rythmique haletante. En fin de parcours, retour à la lumière avec 'Field After Field', titre chatoyant, vaporeux soutenu d'un parlé réconfortant, alors que file une mélodie enchanteresse. Faisant suite à l'instrumental, 'Ypsilon', tirade onirique et expérimental, 'Mother-Of-The-Pearl Moon' se referme avec le bouleversant 'Away From Me', titre fait de remouds marins qui  tantôt bercent, tantôt chahutent dans un océan où ciel et terre ne font qu'un. Majestueux épilogue pour un disque riche et cossu.
Une fois encore AND ALSO THE TREES sans renier ses racines, s'appuie sur ces fondations, sur son histoire et son expérience pour entamer un  processus de re-création salutaire, proposant là un disque cathédrale dont l'épure n'a d'égal que sa grandeur. Une oeuvre profondément humaine qui n'a pas fini de divulguer tous ces secrets ...

[O. Hans Léonelli]

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